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Divine Comedy Interview

Le rendez-vous est à 15 heures mais la balance n’est pas finie. Aéronef. Pas un musicien ne garde son sérieux. Neil imite Kate Bush. Le groupe l’attend pour un soundcheck ; ‘National Express’. A se tordre en deux, mais… Discrétion. Patience. Décontraction, on en a jusqu’à 17 heures et je n’ai ni clope ni thune. J’espère pouvoir en taxer tout à l’heure! Enfin… Peut-être Neil Hannon?

A quelle genre de set doit-on s’attendre pour la tournée Fin de Siècle?
Bien, deux guitares, basse batterie, des percussions, et puis les deux claviers ont chacun deux synthétiseurs pour les ‘nappes’, les séquences et les merveilles électroniques. L’orchestre de la dernière tournée nous coûtait bien trop cher, malheureusement: c’était idéal pour les chansons un peu ‘croony’, le côté orchestral de notre son aujourd’hui. J’adore le coup des violons, ce côté volontairement difficile de l’accompagnement. C’est vraiment dans cet ordre passionnel que je fais ce métier, parce que c’est ainsi que j’ai appris à chanter. Tu sais, de fait, j’ai encore l’orchestre, mais surtout dans la mesure où je peux me permettre de l’emmener en tournée, où ça vaudra le coup sur scène. Sur Fin de siècle, plus de cent musiciens sont intervenus (on peut pas encore vous offrir ça…! Rires), mais cela n’est pas gênant sur scène: plus l’orchestre est grand, plus c’est facile d’en dupliquer le son pour les claviers, parce que le son est nettement plus embrouillé, flou. Un seul violon, ça c’est difficile à sonoriser. Pour le groupe, de fait, on a eu plus de mal avec l’intimité de Short Album About Love.

Pourquoi, parce que vous jouez seulement les nouveaux morceaux? As-tu du mal à chanter les vieux morceaux de base, genre ‘Europop’…?
Ah mais on va la jouer celle là, qu’est-ce que vous croyez! A part les trucs d’avant Liberation, je n’ai honte d’aucun morceau. Bien sûr j’en préfère certains, mais si je les ai faits, ils sont tous cools! (Rires). Non, mais avec les musiciens, tout le monde a son mot à dire. Il m’arrive de discuter, de laisser tomber, même si j’ai comme qui dirait ‘droit de veto’! Notre set est nouveau, on vient de le tourner en Grande Bretagne et au bout du compte j’ai ce que je veux: un putain de set ‘coup-de-pied-au-cul’!

Pourquoi, ‘au bout du compte’?
Et bien, on s’est plutôt lancé lentement sur le marché britannique, qui a raté les deux premiers albums. Il n’y avait pas assez d’esprit ‘single’ pour les radios ; de plus, la France est sans doute plus ouverte, surtout quand on parle un peu d’elle. Je ‘deal’ avec la France, mais n’allez pas croire que c’est un rapport d’échange: je pille, je ne rends pas! (Rires)

Aux romanciers, aux cinéastes, par exemple? Te sens-tu proche de l’un d’entre eux?
Oui et non… A choisir, s’il devait en rester un seul, ce serait plutôt Terry Gillian. J’adore ce type: il n’a aucun respect pour la réalité. Il est comme les frères Coen, il fait ce qu’il veut… Au fond, je n’ai jamais fait dans le genre strictement Irlandais, bien au contraire. Je suis une espèce de nationaliste qui pique à droite et à gauche… C’est à côté du public que je veux coller ; inconsciemment peut-être, j’ai réussi. J’écris les chansons que les gens voudraient entendre et cela passe par l’excès, comme avec l’album Casanova, un album plus britannique…

Est-ce que la presse te comprend, je veux dire, à part Presto!?
Ceux qui crachent dans la soupe ne devraient pas nous la resservir… Presto! est cool, rien que le nom… (Rires) Ce que j’aime en France, c’est que les gens adorent discuter, comme à la télé française, tu vois: bla bla bla… Alors que la presse anglaise est très imbue d’elle-même, vraiment bizarre. Le N.M.E. et le Melody Maker sont aussi gros en tirage que le Guardian, mais leur vente baisse. Quand le music business souffre, comme en ce moment, il faut vraiment qu’ils s’arrachent. Fin de Siècle se vend bien et c’est très drôle, on est en train de se croiser avec des groupes très ‘hypes’, genre Pulp, dont le dernier album est dépressif à souhait… Divine Comedy n’a jamais joué sur le ‘hype’ et la pub, sur la classe ‘affaire’.

Tu plaisantes… Vous n’êtes toute de même pas Summer Factory…
Qui ça? (Rires)

Non, des copains qui t’imitaient un peu, il y a quelques années ici…
(Rires) En France, j’aime bien Dominique A. et ce mec là … Yann Tiersen. On m’a aussi parlé de Jay Jay Johanson, mais je regrette le ‘one way trafic’, le fait que vos artistes ne soient pas connu en Grande Bretagne. Là-bas, on ne connaît que Air ou Daft Punk, qui sont vraiment fantastiques, d’ailleurs. Je ne plaisante pas: ‘Sexy Boy’, this is my ‘musique’ Ca! Nous, en tous cas, on a surtout eu beaucoup de presse, et de la bonne, merci Presto! (Rires). On ne passe pas beaucoup à la radio, encore moins à la télé. On ne porte aucun drapeau à la mode, on grossit tranquillement, quoi.

Tu veux dire, comme le sujet de tes albums ou les personnages qu’on y croise? De la station balnéaire à la capitale, du romain familial à la génération ‘Diana’, de Promenade à Fin de Siècle?
(Rires)… Écoutez bien le son aussi, et regardez les pochettes…! (il fait signe: je prends la grosse tête). J’ai toujours dit que je faisais ce métier à cause du succès à la sortie. Ca doit être drôle d’être célèbre et si cela ne marche pas, tant pis: je peux faire mille autre choses que pop’star. (Quoi, alors?)… Et bien, il y a des tas de chouettes boulots dans le commerce (Rires) Non, je déconne! Je retournerai au songwriting bizarre, à des trucs abstraits… Tu sais, le genre “il vend peu, mais c’est un mec vraiment sympa!”

“Qui ne touche pas à la couronne”?
C’est ça, sauf qu’avec ‘Generation Sex’, tout le monde sait aussi que je parle vrai. J’ai eut affaire aux traditionnels rabat-joie, mais c’était aller trop loin. La presse gavait le grand public, le public hantait la presse: la machine s’est emballée et en deux temps, tout le monde était en noir! Ce qui est marrant, vous avez vu, c’est ce récent réexamen au premier anniversaire de sa mort: tout le monde a fini par se rendre compte, (je n’ai rien contre elle mais…) qu’elle n’avait pas été élue, que personne ne l’avait choisi à part Charles (pour sa jeunesse) et les médias (pour son adultère)!

Mais ma parole, tu es non seulement nationaliste, mais républicain!
A tout dire, j’ai toujours été un peu antimonarchiste. Je n’irai évidemment pas aussi loin que vous, qui leur coupez la gorge, mais… (Rires) leur filer deux-trois millions chacun et les envoyer à Monte-Carlo… Qu’est-ce que tu en penses?

C’est pas mal, sinon il y aussi le plan Titanic, ça marche pas mal ces temps-ci. T’as pas une clope s’il te plaît?
Non, je ne fume pas, désolé!
Oh c’est pas grave je peux aussi bien m’en passer (menteur).


François Dubar
Presto! 28, Hiver 99